Illusion de la personne [02]
Il recula de quelque pas et regarda cette personne. Cette dernière releva un regard noir sur lui, ne prenant pas la peine de replacer ne serait-ce qu’une seule mèche de cheveux. Il l’observa, cette personne qui à la fois lui apparaissait femme, mais qu’alors que ses mains la caressaient, un homme recouvrait ce corps féminin. Il se reprit, reprenant toute sa grandeur et plongea son regard émeraude dans la colère de l’autre. Il tourna les talons et quitta la pièce, blanche, froide, dépourvue de vie.
Elle soupira, s’assoyant au sol regardant autour d’elle cette pièce si vide, si pure par sa blancheur. Elle repensa à cette silhouette, sa main tendue. Cette main qui se perdit dans le vide plus d’une fois, alors qu’elle cherchait le réconfort d’une présence. Son inaction, lorsqu’elle s’en éloignait, le choc qui sembla la parcourir lorsqu’elle hurla en sa direction… Elle soupira, fermant les yeux et s’adossa au mur. Elle chercha le sommeil, laissant son esprit se promener au travers des pièces de cette maison, qui lui apparaissait de plus en plus grande, cherchant cette présence si particulière.
* * *
Le grand homme sortit de la pièce d’un calme calculé, il tourna à sa gauche, marchant jusqu’à un grand hall. Là, il y trouva une dame à qui il demanda de lui envoyer ses deux conseillés. Elle se courba et partit aussitôt à la recherche de ces deux personnes. Un sourire se dessina sur les lèvres de l’homme, tandis qu’il voyait la dame s’éloigner. Il se retourna et se dirigea à ses appartements, d’où il les attendrait. Il poussa la porte et s’avança pour se laisser tomber dans un récamier. Regardant autour de lui, il laissa sa tête rouler sur le dossier, alors que trois coups distincts se faisaient entendre contre la porte. L’homme lança un simple « entrez », tandis que la porte s’entre ouvrait, laissant apercevoir deux silhouettes. Celles-ci se placèrent devant lui, prenant place dans deux autres sièges. L’un des deux hommes se racla la gorge avant d’émettre le moindre son. Tandis qu’un léger sourire se dessinait sur les lèvres du second.
- - Est-ce bien la personne que nous recherchions? Demanda le premier.
Un large sourire se dessina sur les lèvres de celui qui les avait fait venir à sa chambre. Il regarda les deux hommes qui comprirent aussitôt sa réponse. Les invités s’observèrent un instant avant de se retourner vers le jeune homme, souriant.
- - Bien. Si c’est bien cette personne, nous allons devoir les appeler, prononça l’un des deux hommes.
- - Non. J’aimerais que vous attendiez, j’aimerais lui parler un peu. Avant qu’elle ne soit entrainée dans toute cette histoire.
- - Elle!?
- - Ou il, c’est comme vous le voyez, prononça-t-il une pointe d’ironie dans la voix.
- - Hum! Bien sûr si c’est elle, il nous sera impossible de déterminer sa véritable identité.
- - Bien, dans ce cas, prévenez-nous lorsque nous pourrons appeler les chimères.
Le grand homme leur fit un signe positif de la tête et ceux-ci quittèrent la pièce sans dire un seul mot de plus. Il soupira, ayant quelque peu sauvé cette entité du destin exécrable qui l’attendait. Il décida de retourner la voir, de la connaître, puisqu’ils auraient à le faire un jour ou l’autre. Dans d’autres circonstances bien entendu, mais du moins il saurait qui elle avait été. Il marcha dans le long couloir sentant un regard posé sur lui, comme si déjà elle était à ses côtés. Il donna quelques coups sur la porte avant d’entrer.
Il la retrouva étendue de tout son long, contre le mur. Elle était endormie et apparemment femme. Sentant toujours ce regard, il s’avança vers elle pour la réveiller et tenter de lui parler un peu. Du moins, essayer de s’excuser pour ses agissements précédents, mais c’était la seule façon de savoir si elle était bien cette personne dont il avait besoin. Il se pencha vers elle, tandis que la présence disparaissait. Elle ouvrit subitement les yeux, blancs, et se leva d’un trait empoignant ses épaules pour l’immobiliser au sol. Ce dernier ne s’y opposa point, la laissant agir. Ses cheveux maintenant longs tombèrent en mèche sur le visage de l’homme.
- - Qui es-tu? lui demanda-t-il, caressant son visage féminin.
Elle se redressa aussitôt, alors que son regard devenait brun, que ses cheveux s’écourtaient et qu’elle arborait de nouveau cet air agressif. Il se redressa, restant assis au sol, histoire de ne pas l’effrayer plus.
Cette présence, elle l’avait suivi depuis sa sortie de la chambre, mais rien ne présageait quelque chose de mauvais chez lui. Elle prit une grande inspiration avant de se pencher vers lui. Elle plongea son regard dans le sien et avança vers lui tel un félin pour aller murmurer à son oreille.
- - Je ne suis qu’une illusion rien de plus, prononça-t-elle un sourire aux lèvres.